BRUXELLES — L’Union européenne disposera bientôt de nouveaux pouvoirs lui permettant de réduire et, à terme, d’interdire la circulation du gaz russe sur le continent au cours des trois prochaines années. Ces mesures sont annoncées dans le cadre d’une initiative sans précédent de la Commission visant à réduire la dépendance à l’égard de la Russie.
S’exprimant à Strasbourg mardi, le commissaire à l’énergie Dan Jørgensen va dévoiler ses propositions pour éliminer les importations de combustibles fossiles en provenance de Russie d’ici 2027, une fois reçu l’aval du cabinet de la présidente de la Commission.
Un projet de document, vu par POLITICO avant sa publication, s’engage à supprimer “l’exposition de l’Union aux risques significatifs pour le commerce et la sécurité, résultant du commerce du gaz avec la Fédération de Russie, en établissant une interdiction progressive des importations de gaz naturel [et à] introduire des règles pour mettre en œuvre et contrôler efficacement cette interdiction”.
A partir du 1er janvier 2026, l’importation de gaz aussi bien par gazoduc que par voie maritime sera interdite. Des exceptions sont prévues pour les importations dans le cadre de contrats à court terme conclus avant le 17 juin 2026 ; pour les pays enclavés qui ont conclu des accords de long terme avec la Russie ainsi que pour certaines entreprises européennes qui ont également conclu des contrats à long terme — l’interdiction s’appliquera à partir du 1er janvier 2028 pour celles-ci.
Dans une démarche sans précédent, le gaz qui arrivera dans l’UE via la Russie, par exemple par des points d’interconnexion en Serbie, sera considéré comme du gaz russe sauf preuve du contraire. Une documentation claire devra montrer qu’il provient d’une autre source.
Les pays devront également publier de nouveaux “plans de diversification” indiquant comment ils entendent mettre fin à leur dépendance à l’égard du pétrole et du gaz russes.
Ces mécanismes juridiques ont été promis dans le cadre de la feuille de route REPowerEU qui entend sevrer l’Europe de l’énergie russe le mois dernier. Celle-ci trace la voie à une interdiction générale de l’approvisionnement en combustibles fossiles qui financent la guerre du Kremlin en Ukraine. Elle concerne également l’achat de combustible nucléaire. Sur la base de cette feuille de route, les entreprises seront tenues de rendre compte de l’origine de leurs importations d’énergie.
Dans le même temps, la Commission a adopté de nouvelles sanctions, proposant un moratoire sur l’achat d’essence, de diesel et de kérosène raffinés à partir de pétrole brut russe et soutenant la baisse d’un plafonnement prévu par le G7 pour le pétrole russe, qui le ferait passer de 60 dollars le baril à 45 dollars seulement.
La Hongrie et la Slovaquie ont menacé d’opposer leur veto à toute mesure qui viserait à leur couper les vivres, si la Commission poursuivait son plan. En effet, ces deux pays pro-russes ont continué d’acheter du pétrole et du gaz russes depuis le début de la guerre, et ont même utilisé des dérogations temporaires pour s’enrichir grâce à des approvisionnements bon marché.
Selon le texte présenté par Dan Jørgensen mardi, ces pays bénéficieraient d’un délai supplémentaire pour sortir de l’énergie russe, compte tenu de leur faible progression jusqu’à présent. Bien que ces mesures soient d’ordre commerciales et fiscales — qui peuvent être adoptées à la majorité qualifiée — l’introduction de nouvelles sanctions et la reconduction des sanctions existantes nécessiteront le soutien unanime de l’ensemble des 27 pays.